A quoi jouent Rached Ghannouchi, président d’Ennahdha, et Abdelkarim Harouni, président du Conseil de La Choura ? Dans la soirée du mercredi 20 janvier 2021, les deux nahdhaouis se sont « distingués » par un appel plus que douteux et à peine croyable : face aux manifestations et aux violences nocturnes, ils ont appelé les jeunes et les citoyens à former des groupes d’intervention improvisés dans l’objectif, selon eux, de soutenir les sécuritaires et l’Armée Nationale.
C’est comme s’ils appelaient à constituer des milices, ou une sorte de force parallèle, même si cette dernière n’est pas étrangère au mouvement islamiste – on se souvient de l’appareil sécuritaire secret dont on ne parle presque plus -.
Ni Rached Ghannnochi, ni Abdelkarim Harouni ne semblent avoir conscience que la Tunisie possède déjà ses forces républicaines : les sécuritaires (Garde Nationale et tous les autres corps) et l’Armée Nationale. Les deux institutions fonctionnent très bien et gagnent, au fil des années en expérience. Les nahdhaouis, pour se justifier, ont fait le rapprochement entre l’attaque terroriste de Ben Guerdane du 7 mars 2016, où des citoyens sont intervenus pour aider les forces sécuritaires, et les dernières manifestations.
L’État est le seul détenteur du monopole de la violence légitime pour assurer l’ordre
En fait, c’est une comparaison qui n’a pas lieu d’être. L’attaque de Ben Guerdane est un acte terroriste, commis par des groupes d’individus qui veulent détruire la nation. Concernant les manifestations nocturnes, il s’agit de citoyens, qu’ils soient casseurs ou manifestants pacifiques, et non de terroristes. Autrement dit, ce ne sont pas les ennemis de la nation et de l’humanité comme les terroristes. Plus encore : face au terrorisme, tout le monde doit être mobilisé : sécuritaire, armée, média, citoyen… Tout le monde. Les deux dirigeants oublient, aussi, que l’État est le seul à détenir le monopole de la violence légitime pour assurer l’ordre, comme l’a souligné le sociologue allemand Max Weber.
Pour résumer, les déclarations de Rached Ghannouchi et d’Abdelkarim Harouni sont d’une extrême dangerosité. Elles ne doivent pas passer inaperçues. En effet, les autorités sécuritaires doivent prendre les mesures nécessaires, à commencer par l’audition de Rached Ghannouchi et d’Abdelkarim Harouni. Leur appel n’était pas sans risque connaissant le nombre important des partisans d’Enndhaha.
Fakhri Khlissa