Selon le dernier rapport publié par l’Organisation mondiale de la santé, le rôle de la prévention est primordial dans la lutte contre les maladies non transmissibles qui font chaque année plus de 38 millions de décès dans le monde.
Changer le cours de l’épidémie de MNT : mission possible
L’OMS exhorte tous les gouvernements à faire le nécessaire pour atteindre les cibles mondiales relatives à la réduction de la charge des maladies non transmissibles (MNT) Dans ces dernières on inclut les maladies cardiaques ou pulmonaires, les accidents vasculaires cérébraux, les cancers , le diabète.
«La communauté internationale a la possibilité de changer le cours de l’épidémie de MNT», a déclaré le Dr Margaret Chan, Directeur général de l’OMS, lors de la présentation du rapport sur la situation mondiale des maladies non transmissibles 2014. «En investissant à peine 1 à 3 dollars par personne et par an, les pays peuvent réduire considérablement la charge de morbidité et de mortalité due aux MNT. En 2015, chaque pays doit fixer des cibles nationales et appliquer des mesures d’un bon rapport coût-efficacité, faute de quoi des millions de personnes continueront à mourir prématurément. La plupart des décès dus aux MNT peuvent être évités. Sur les 38 millions de décès provoqués par les MNT en 2012, 16 millions, soit 42%, étaient prématurés et évitables, contre 14,6 millions en 2000.» a-t-elle précisé.
Des chiffres alarmants
En Tunisie, les quelques chiffres dont nous disposons ne sont pas rassurants : 15% des Tunisiens seraient diabétiques alors que cette maladie ne touche que 4% des personnes dans le monde, 2,7 en France, 8,9 en Algérie et 8% au Maroc. Nous avons donc ce chiffre effrayant de 1 700 000 diabétiques tunisiens. Plus que la population du grand Tunis.
On rappellera également, et ceci est inquiétant, que l’OMS estime que la prise en charge du diabète en Tunisie n’est pas optimale et que 50% des diabétiques ne sont pas diagnostiqués. Toujours selon l’OMS, le diabète figure parmi les cinq premières causes de mortalité, dans notre pays, et serait à l’origine de 8,1% des décès chez les femmes et 5,7 chez les hommes.
Et pourtant la Tunisie a lancé un programme national de lutte contre le diabète depuis plus de 30 ans, mais il semblerait qu’il ait échoué sur toute la ligne puisqu’en 1976 on comptait 3,8 % de diabétiques dans la population tunisienne, en 1997 :9,9% et en 2013 : 15% ! Le diabète a augmenté de 43% !
En termes de coût, une personne diabétique coûterait 240D par an à l’État s’il n’y a pas de complications et 24 275D s’il y en a. (chiffres donnés par l’Institut de nutrition de Tunis).
Les causes du diabète sont l’obésité, la sédentarité, l’hypertension artérielle, le cholestérol, le tabac, l’âge et le fait d’avoir un parent proche diabétique (notion d’hérédité). La prévention et même le traitement du diabète repose sur des règles hygiéno-diététiques. Le diabète mal géré provoque de graves complications et une mort prématurée.
Les maladies cardio-vasculaires sont également inquiétantes. La mortalité due à ces maladies a augmenté de 30%. Les facteurs de risques de ces pathologies sont le tabagisme, l’hypertension artérielle, l’obésité, le diabète, tous en nette augmentation en Tunisie. Inutile de dire que si on ne réagit pas immédiatement, on aura de graves problèmes de santé publique dans 10 ans
En Tunisie, tout a été dit sur les maladies cardiovasculaires. On les connait sur le bout des doigts. On sait quoi faire, pour qui, pourquoi, comment et surtout ce qu’il faut faire pour venir à bout de cette nouvelle épidémie. Et pourtant les chiffres ne sont pas rassurants, pourquoi? On devrait regarder du côté de ce qu’on mange. L’OMS à maintes fois exhorté les états à contrôler l’industrie agro-alimentaire. Diminuer la quantité de sel et de sucre dans les plats cuisinés, dans les boissons, dans les biscuits dans le pain etc. Au niveau Tunisien rien n’a été fait. A titre d’exemple : le citoyen tunisien consomme 13,5 g de sel par jour alors que la norme est 5g ! Pire : 80% de ce sel provient du pain ! Il est temps d’établir des standards pour la quantité de sel dans le pain et de discuter avec les professionnels et leur demander de baisser la teneur du sel dans le pain.
Des actions préventives
Dans cette optique, l’institut national de nutrition est en train de mener un programme de réduction de la consommation de sel, de sucre et de gras. Cinq actions sont programmées : réduire la consommation de sucre par des actions de sensibilisation du consommateur, réduire la teneur en sel du pain et des fromages en partenariat avec les boulangers et les industriels des fromageries, réduire la teneur du lait demi écrémé en lipides par la règlementation, interdire l’importation et la production des acides gras trans fabriqués industriellement, réduire l’importation d’huile de palme et la remplacer par une autre huile favorable à la santé, olive, soja, colza, tournesol, maïs.
Une expérience est en cours actuellement à Bizerte où les boulangers, partenaires de ce programme vont réduire de 10% la teneur du pain en sel, tous les 6 mois pendant 2 ans. Les industriels des produits laitiers vont à leur tour réduire la teneur en gras de 10% tous les 6 mois pendant 18 mois. Les résultats de cette action et les effets sur la santé des Bizertins seront connus dans quelques mois.
Samira Rekik